samedi 12 mars 2016

ça fait mal, hein ?

Burgess et WC Fields avaient beaucoup de mal avec les dentistes. Vous vous demandez sans doute pourquoi. Moi pas.

J’ai eu droit un peu à tout, du bellâtre saisonnier au connard qui t’arrache une dent pendant que son assistante lui fait une scène de ménage et qui est tout surpris quand de ta cavité buccale malmenée jaillit du sang, les gens sont sales, vraiment. Je me suis tirée du dispensaire dentaire après un bras d’honneur et sans payer, les sadiks, il ne faut pas les encourager.

Le barjot m’ayant détruit la mâchoire à grands coups d’arracheuse de dents et comme je ne souhaitais pas le revoir, par manque de masochisme, j’ai dû m’ôter les fils de suture à la pince à épiler après m’être copieusement défoncée à l’aspirine. Un petit côté western qui peut avoir son charme, pas vrai ?

J’ai aussi eu droit à la dentiste incompétente mais fille de dentiste (ce qui explique sa vocation à défaut de mieux) qui m’a suivie pendant des années sans jamais prendre la peine de me dire que j’étais atteinte d’une maladie parodontale et qu’il fallait que je prenne soin de mes gencives. Qui m’a fait subir une greffe (un morceau de palais greffé sur la gencive, je vous conseille, c’est jouissif !) inutile.

Sans compter tous ceux qui constatent les dégâts et poussent des cris de bête au lieu de faire leur boulot, qui est, rappelons-le de soigner.

Parce que leurs considérations variées et atterrées sur l’état de mes dents, le fait que je n’ai pas bénéficié d’orthodontie alors qu’il aurait fallu – ce n’était pas du tout courant à mon époque et pas du tout le genre de ma famille -, leurs interrogations sur le pourquoi du comment, je m’en contrefous, pour ne pas dire des choses plus contondantes.

C’est pour ça que je suis sortie assez furax de la salle des tortures de la dernière frappadingue que j’ai dû me coltiner pour prendre le taureau par les cornes et ma santé buccale en main.

Cette brave femme en perpétuelle explosion, après avoir rouscaillé contre son assistante (une souris grise aux aguets, ça ne doit pas être facile pour elle tous les jours, entre la Mengele de la roulette et sa collègue assistante, une claironnante andouille en mode gros ouaoua), s’est attachée à me torturer les gencives tout en me fusillant du regard et en émettant des remarques pourries et totalement superfétatoires et hautement désagréables, et en me recommandant l’arrachage de mes dents de sagesse. Comme j’en ai besoin pour mâcher, j’ai juste levé le sourcil gauche tout en pensant « cause toujours tu m’intéresses ».

Je me tortillais comme un ver et manifestais mon désagrément et ma volonté farouche de réagir, violemment si nécessaire, à ces agressions, alors Madame Roulette-dans-tes-yeux décida de plier les gaules et m’annonça qu’elle cessait les hostilités. 

« C’est con, on vous torture et vous n’y prenez aucun plaisir, avouez que vous avez mauvais fond, Madame. »

Je lui ai indiqué que j’étais en effet assez peu encline à me laisser brutaliser, tout en m’excusant bien sûr, de ne pas la boucler et subir.

Elle a pris un air contrit, parlé de mon « ressenti », expliqué qu’elle procédait à une technique, qu’il fallait un nettoyage profond. Je lui ai appris qu’autour des dents il y a des gens et aussi que mon seuil de tolérance à la violence est ridiculement bas.

Elle m’a rendu mes petites affaires, on sentait qu’elle se retenait d’en venir aux mains.

Je me suis précipitée vers le bureau des assistantes et la sortie. L’assistante grande gueule a fait semblant de ne pas me voir, alors j’ai tourné les talons et je me suis arrachée, tandis que l’autre tarée se faisait plaindre (« Les assurés sociaux sont incroyables, vraiment ! »).

La claironnante assistante a propulsé sa blouse blanche dans ma direction, armée d’une carte que je n’ai pas prise, aucune probabilité que je remette jamais les pieds dans cet asile d’aliénés, et a tenté de me faire prendre des vessies pour des lanternes : il aurait fallu que je patiente et blablabli et blablablo. Mes gencives hurlaient de rage. Je les ai plantées là après leur avoir indiqué que comme je venais de me faire torturer, je voulais rentrer chez moi le plus vite possible.


Elles doivent être habituées à des mâchoires plus dociles et plus reconnaissantes, avec qui elles peuvent tranquillement faire leur petit numéro, ça va leur faire des histoires à raconter à la veillée.

Merci la Sécu, de m'avoir indiqué cette adresse !