mardi 28 février 2012

La radio sert à informer

Réveil, allumage de la radio, écoutage des nouvelles.

Un Français de moins de 50 ans sur deux aura connu le chômage durant sa vie. C'est pas moi qui le dis, c'est l'INSEE et la dame dans la radio.

Ah bon ? 

Combien de temps les données statistiques mettent-elles à se transformer en réalité pour les ceusses qui traitent les chômistes (un Français sur 2 de moins de 50 ans au moins une fois dans sa vie, ça commence à faire du monde !) de tous les noms et rêvent d'éradiquer par tous les moyens cette population d'assistés qui plombent l'économie mondiale et le moral des ménagères de moins de 50 ans et leur panier moyen ? 

Je reprends ma respiration, elle est très longue, cette phrase, et je pose une autre question dans la foulée : vous trouvez que c'est normal de continuer à nous vendre des semaines de 35 heures pendant lesquelles on se tue au turbin avec l'espoir insensé de ne pas faire partie de la prochaine charrette si on passe bien entre les gouttes et si notre chef vénéré ne pète pas un plomb et si on rit bien à ses blagues nazes, alors qu'on pourrait moins bosser tous au lieu qu'une partie de la population doit crever la misère pour qu'une autre partie remplisse sagement ses devoirs de gentil petit soldat avec la trouille au bide ? 

Aucun des intelligents d'élite qui aspire à nous gouverner ne pose la question, ils rêvent de trouver des solutions pour nous remettre au boulot pour le moins cher possible, mais à part ça, ballepeau, peanuts et fourre-toi le doigt dans l’œil, on croirait qu'on est tous devenus des foutus mongoliens qui rêvons de finir nos jours le dos courbé sur une machine à marner pour 5 euros de l'heure tellement on sera contents d'avoir trouvé un job et tellement le travail est épanouissant ! 

Et c'est à qui nous promettra des lendemains pleins d'heures sup défiscalisées et d'encore plus de course contre la montre, tellement on s'emmerde chez nous avec nos familles et nos amis ! Ils doivent vraiment avoir des vies de merde, je sais pas, ou pas envie de trop voir leur famille (ça peut se comprendre, je juge pas, certaines familles sont vraiment déjantées) mais de là à nous forcer tous à entonner l'air de Le travail c'est la santé, faut pas pousser... 

Et la tronche des gens quand tu dis que tu es au chômage et ton enfant qui n'ose pas le dire à ses copains d'école parce qu'il ne veut pas passer pour un « cassoce »...

Une nouvelle race, ça, le cassoce, qui correspond, si j'ai bien compris à tous ceux qui dépassent et ne pourraient même pas faire de la figuration dans la pub Ricoré. 

Personne ne veut être un cassoce et pour rester sur la belle photo, celle des ouineurs de la life qui font des crédits pour s'acheter une belle maison qu'ils meubleront avec le goût très sûr que promeuvent à tour de bras les émissions de télé qui aiment beaucoup le taupe, le chocolat et le prune, les non-cassoces font des pieds et des mains, s'habillent bien comme il faut (le moindre détail qui cloche et t'es éjecté, à vitesse grand V vers le no man's land des cassoces), anticipent les situations nouvelles, pour toujours rester dans le mouvement et le rang, ne pas trébucher et conserver leur place, tellement s'ils la perdent un autre la prendra, quitte à piétiner ceux qui ont eu le malheur de ne pas suivre le rythme.  

Et un matin à la radio, tu apprends que les statistiques sont de toute façon formelles et que la cassocerie est une donnée désormais inévitable et tu te demandes si par hasard il n'y aurait pas un peu quelque chose de pourri dans le royaume du Danemark... 

Et tu ne sais toujours pas pour qui tu iras voter et si tu iras, parce que tu commences à en avoir un peu assez de te faire prendre pour un veau tous les jours que Dieu fait. Tu en as assez d'entendre des jeunes gens ambitieux te concasser la tête dès le matin avec leurs joutes égotiques et leurs débats qui ne mènent à rien. 

Tu éteins la radio et tu regardes le ciel, il fait beau et ta grande cassocerie te permet d'apprécier ce moment. Tu ne sais pas à quoi ressemblera ton budget dans les mois qui viennent, ni quel boulot de merde tu vas encore être obligé de te fader pour gagner ta vie, ni quel petit chef pété du bulbe il va encore falloir que tu supportes le temps de renflouer ton compte en banque, et tu décides qu'à chaque jour suffit sa peine et que pour l'heure, tu vas finir ton thé et fumer une clope.

C'est tout, vous pouvez fumer !

EDIT du 5 mars 2012 : J'ai quelque peu modifié ce billet après avoir vu une émission de Toute l'histoire sur l'extermination des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. J'avais honte.

samedi 25 février 2012

Retour vers le futur

Ce qui est bien avec la campagne présidentielle en cours, c'est qu'on ne risque pas d'avoir peur du futur, tellement elle baigne dans le passé et les vieilles dentelles. 

Ils nous refont les trucs éculés dont ils croient qu'ils marchent encore : promesses à gogo pour les gogos et jeté de nonos.

Pendant qu'ils aèrent leurs costards à 20 000 et leur pathétique manque de sens politique, le monde continue de tourner et le futur de cogner violemment à la porte, trimballant avec lui un bon paquet de questions dont les hommes qui aspirent à nous gouverner se gardent bien de prononcer le nom.

Pendant ce temps-là qu'ils nous prennent vraiment pour des veaux, le futur et la globalisation, on se les prend en pleine poire, avec leur lot de compétences qu'il ne va pas falloir manquer d'acquérir vite fait bien fait si on ne veut pas faire de la figuration inintelligente sur le bas-côté, à regarder passer le magnifique TGV de la modernité... 

En passant, je ne voudrais pas dire du mal des hommes politiques, mais c'est tout de même la honte totale la façon dont ils sont peu portés sur les langues étrangères, alors que nous, il faut qu'on parle chinois, brésilien, anglais et japonais si on veut espérer décrocher un job payé 9 euros de l'heure... 

Sinon, je viens de me mettre une guitare électrique dans les mains et je me demande pourquoi j'ai attendu si longtemps pour réaliser ce rêve que je me trimballe depuis des décennies.

Des fois, on s'interdit des choses et c'est bien couillon...

C'est tout, vous pouvez fumer !

mercredi 22 février 2012

Flexisécurité et toutes ces choses...

J'ai travaillé de longues années, et sur mes fiches de paie il y a une ligne qui indique qu'il y a eu des cotisations pour abonder un fonds destiné à la formation.
Tout au long de ces longues années, je n'ai jamais bénéficié de formations au sein d'une entreprise (on n'y pense pas tant qu'on a un boulot : on bosse). 
Tout au long de ces mêmes années, je me suis également souvent retrouvé au chômage (je suis du genre aventureux et la vie est courte). 
Lors de ces périodes d'inactivité productive, j'ai demandé par deux fois à bénéficier de formations. À chaque fois, ça a été une galère sans nom. 
La première fois, on m'a demandé des tas de trucs, tout juste si on ne m'a pas regardé le fond de la culotte.
La deuxième fois, le peu compétent agent de l'agence pour l'emploi s'est totalement planté et il va falloir que je me recoltine tout le dossier pour remettre ça d'équerre... Passons.
La nuit, il m'arrive de me demander si ça ne serait pas plus simple que tout le fric qui a été cotisé sur mes fiches de paie toutes ces années m'ait vraiment servi à me former au lieu que je ne sais même pas à quoi il a été utilisé.

lundi 20 février 2012

Nos amies les bêtes

Il y avait une corneille perchée sur une antenne, la tête penchée. En regardant sur la droite, on a vu la queue d'un chat vibrionner hystériquement sur le toit de l'immeuble d'en face. La pie s'est envolée à toute blinde, la queue en sémaphore. Trois corneilles sont alors arrivées en piqué et ont fait les bombardiers pendant un petit moment pour décourager le chat sur le toit.
Les corneilles sont d'un noir profond que je n'ai jamais vu ailleurs en vrai.
Moralité : depuis qu'on n'a plus de jardin et qu'on vit en étage, on redécouvre la vie des oiseaux et la trajectoire des avions.
Un rouge-gorge gras comme un loir vient régulièrement et par courtoisie (il n'a vraiment pas besoin de ça vu son air prospère) picorer les morceaux de pain que nous laissons à son intention sur la terrasse.

Aux avant-postes de la précarisation

C'est plaisant d'être pionnier et précurseur, surtout si comme moi on goûte peu la facilité et la routine. 
Tout de même, parfois, je reconnais que je fatigue un peu. 

Vous en connaissez beaucoup des boulots où on vous demande de travailler gratuitement et où l'on suppute que vous serez éventuellement payé si le produit que vous avez entièrement conçu et fabriqué se vend ?

J'explique : il s'agissait pour un nouveau concept sur Internet, de rédiger et d'illustrer (photos ou autres) des billets sur des aspects un peu insolites de la ville afin que les internautes se connectant accèdent de façon ludique à des informations et à des propositions commerciales. 

Le rendez-vous pour proposer ce mirifique machin était organisé dans les locaux de Pôle Emploi. Je ne vais même pas faire de commentaires. 

Il y a avait là en espérance de travail quelques plumitifs plus ou moins doués et aguerris, dont un pénible vieux schnock qui se la pétait (pas d'autres commentaires, espèce courante et communément rencontrée dans les contrées plumitives), des jeunes filles fort jolies qui ont très vite quitté la réunion, effarées. 

Pour ma part, aiguillonnée par la curiosité, je suis restée toute la réunion et ça ne manquait pas d'un certain charme. Il faut reconnaître qu'étant donné nos supposées compétences et notre possible inextinguible corvéabilité, le monsieur qui présentait les choses était plutôt courtois (ça change de mes derniers boulots où en plus de te sous-payer et de te faire marner comme un esclave, on te crache à ta gueule de sous-merde prolétarienne). Il faisait de notables efforts pour s'exprimer dans un français correct.

Le problème, c'est que l'annonce de recrutement parlait d'un poste fixe avec salaire à la clé et que plus la réunion avançait et plus on comprenait que c'était de la sous-pige sous-rémunérée au clic. 

J'ai posé quelques questions, le vieux schnock a fait son numéro. Je n'ai pas donné suite. Le monsieur qui avait fait la présentation m'a recontactée pour me demander pourquoi il n'avait plus de mes nouvelles et je lui ai répondu que j'avais pas trop la possibilité en ce moment de consacrer du temps à travailler sans être payée.

Vous me direz, il faut avoir le tempérament entrepreunarial et la fibre indépendante. Je vous répondrai : « Vous en connaissez beaucoup, vous, des secteurs où on vous prend autant pour des truffes ? »

Imaginez qu'il y a des gens qui trouvent normal de se faire payer cher et sur-le-champ... voire cher et à l'avance... 

Qu'est-ce qui rend acceptable que dans certaines professions il soit communément admis que tu doives crever la dalle et que ton travail ne soit pas correctement rémunéré ? Rien, à part cette espèce de coutume romantique à la noix qui présuppose que le plumitif aime les mansardes et la vie de bohème.

Le plumitif, comme tout le monde, travaille pour maîtriser son outil, achète des livres, des journaux, le plumitif produit du contenu, pour le dire à la sauce moderne, c'est donc un acteur de la vie économique et il aimerait bien qu'on arrête de penser qu'il vit d'amour et d'eau fraîche quand il s'agit de lui donner des sous.

Encore une légende urbaine qui bat de l'aile : le plumitif paie son loyer et son bifteck au même prix que tous les autres acteurs de la vie économique, il n'a pas de ristourne ni de tarif préférentiel même si on lui propose insolemment souvent de le payer avec des queues de cerise au motif qu'il ne sait pas compter ou que des études de lettres ça rapporte pas tout le monde sait ça.


C'est tout, vous pouvez fumer !

samedi 18 février 2012

Samedi matin

Le samedi, matin, quand on se réveille de bonne heure, que le ciel est bleu et que la maisonnée roupille encore à poings fermés, on traînouille et on glandouille, on se demande ce qu'on pourrait bien faire et finalement on ne fait rien. On se dit qu'on pourrait prendre une douche, mais on va plutôt bouquiner quelques pages en écoutant Everything But the Girl et reprendre une tasse de thé. On se dit que ce qui est pris n'est plus à prendre. Life can be so nice !

lundi 13 février 2012

C'est lundi, c'est vomi de raviolis !

One - Entendu l'autre matin Philippe Sollers sussurer à la radio qu'il était bien content d'avoir toute sa vie échappé au « travail servile ». Les travailleurs serviles, ils devraient arrêter de conduire des taxis et de faire la cuisine dans les endroits que fréquente ce sympathique fils de boutiquier qui se prend pour un aristo, ça lui ferait les pieds. 

Two - Encore une matinée bien rock'n'roll à Pôle Emploi. Moralité : on nous fait chier quand on bosse, on nous fait chier quand on est au chômage. 

Y'a plus de respect pour le travailleur, moi j'dis !

samedi 11 février 2012

vendredi 10 février 2012

mercredi 1 février 2012

De la vie de tous les jours et des tests

Hier, je fus au petit supermarket voisin acheter des fournitures pour mon enfant, que nous persistons à envoyer apprendre des choses à l'école, en dépit du fait qu'on nous serine sur tous les tons que ça ne sert à rien. 

Alors que j'arrivais à la caisse, mon attention fut attirée par un grand flandrin hyperbolique. Il venait de saluer la caissière de cette façon légèrement supérieure.

L'honnête citoyen muni d'un boulot bien payé et d'un viatique éternel pour les plaines du Seigneur aime venir dans les quartiers populaires qu'il compte investir (ils ne se rendent pas compte, les pauvres, de ce qu'ils ont et de comment on aimerait bien les chasser de chez eux pour prendre leur place, de toutes façons, ils ne se rendent pas compte, c'est des pauvres, n'est-ce pas ?).

Après avoir donc arrosé le magasin entier de sa superfétatoire et méprisante ostensible politesse, il tentait, l'olibrius clonique, de ranger son panier et ça ne voulait pas, ça ne voulait pas.

Il s'acharnait comme un taré, fronçant ses sourcils sous le coup de la déception. Je finis par lui faire remarquer sans trop insister qu'il ne risquait pas de ranger son panier même en s'acharnant tant et plus, parce que le panier dans lequel il s'acharnait et s'acharnait à vouloir le caser n'était pas du même acabit.

"C'est un test, lui glissai-je, sur un ton légèrement goguenard. Et vous l'avez raté !"

Ça ne lui a pas plu et il m'a fait remarquer que je n'étais « pas sympa ». Je lui ai rétorqué que ça me faisait rire, c'est tout.

Il a derechef embarqué sa moitié au flamboyant manteau et la caissière ne lui a pas dit au revoir. Les pauvres sont des mauvais coucheurs, en plus du reste. J'en ris encore.

En passant : un cahier + un stylo 4 couleurs = un peu plus de 6 euros, soit plus de la moitié du SMIC horaire, ça fait un peu halluciner...

De l'étonnante destinée d'un despoticule articulé qui cause, qui cause et voudrait bien empêcher tout le monde de dormir

Il m'inquiètait, le gorille, ces temps-ci... Il vitupérait dans sa barbe, il maugréait... Je n'osais pas lui poser de questions, habitué à sa déconcertante façon de toujours me répondre en me posant de nouvelles questions : je ne suis pas taillé pour les abîmes, qu'ils soient perplexes ou pas.

Ce matin, je l'ai trouvé riant à gorge déployée. J'étais bien content d'avoir eu l'idée de lui rendre visite car un ami qui rit est un ami heureux et un ami heureux est un ami qui rit.

Il me salua d'un vaste geste et me pria de m'assoir à sa table. Vous ai-je dit que je suis fort gourmand et que le gorille est un hôte de choix ? Bref, nous nous délectâmes de cookies maison et de nos doigts chocolatés. Pour finir, je demandai à mon ami repus ce qui le faisait donc tant s'marrer.

- Hé bien, me dit-il,  il faudrait vraiment être un pisse-froid pour ne pas rigoler en ce moment, vous ne trouvez pas ? Allons, ne prenez pas cet air idiot, vous allez me chagriner... 

Comme je tâchai de corriger l'expression étalée sur ma pauvre face, il me saisit par l'épaule et me secoua comme un prunier :

- Hé mon zami !, tu ne trouves pas ça poilant et hilarant, tout ça ? Je vais te raconter une histoire qui devrait te dérider : Il était une fois un petit pays fort joli, bordé par la mer et l'Océan, un vrai paradis sur Terre, crois-moi ! Or il advint que ce pays tomba par ruse dans les pattes d'un jean-foutre de première bourre. Lequel jean-foutre pilla tant et plus les caisses du délicieux pays, avant de tenter d'installer toute sa descendance à des postes tous plus peinards les uns que les autres. Tandis que le peuple du wunderbar pays suait sang et eau pour alimenter la pompe à pognon que l'indélicat maniait à tour de bras, le jean-foutre faisait cuire des saucisses et prenait des douches dans des atours absolument pharaoniks, tant il est vrai qu'il avait toujours eu un mal fou à se faire prendre au sérieux et ne pensait pas exister s'il n'était pas muni d'un maximum de gadgets fort coûteux.

Le peuple, qui en avait ras-le-bol qu'on lui colle un pistolet sur la tempe pour lui prendre toutes ses pistoles, décida qu'il était temps de bouter le forcené hors du pays.
L'indélicat despoticule le prit fort mal : il augmenta derechef les impôts, histoire de bien racler les fonds de tiroir avant de s'en mettre jusque-là de la dolce vita, et envoya tous ses ministres faire les gros yeux et menacer des pires zatrocités et représailles les habitants du pays, les exhortant à la raison, les tançant et leur promettant cauchemars, tortures et lendemains douloureux.

Las, les habitants le et les regardaient avec étonnement et se marraient comme je le fais à présent, ah ah ah ah ah ah !

Assez ri, comme dirait Boby Lapointe, revenons à nos oignons : Avez-vous trouvé une solution à mes problèmes de chaussettes ?